La Marborda est un territoire aux contours encore assez flous, qui empreinte à l’Amérique latine. Elle suit le même parcours que le Baemon évoqué la semaine passée : elle est en phase d’esquisse, de rassemblement d’éléments d’ambiance et d’enjeux dramatiques.
L’univers FIM
FIM (ou Fortuna Imperatrix Mundi) désigne l’ensemble de mes créations, recouvrant d’une part un univers, et d’autre part un système. Cette page vous donne les clefs pour vous familiariser avec lui.
In-Existence
In-Existence est un cycle composé de trois séries autonomes. L’ensemble emprunte aux genres des histoires de gangsters, de l’urban fantasy et de la low science-fiction. Chaque série explore un aspect d’une même crise, complexe et multifactorielle.
Toutes les citations sont tirées de : « Mexique. Zona 23, la lutte finale » in Courrier international n°1752, du 30 mai au 5 juin 2024, p.52-53, d’après Gatopardo (Mexico) du 20 mars 2024.

🔷 Les faits
J’avais déjà entendu parler du succès du catch au Mexique, et entendu le nom « lucha libre » sans l’associer à rien de particulier. L’article ici utilisé comme ressource évoque une variante qui a un fort potentiel dramatique, tant pour la nature du spectacle (sa violence et son cadre) que pour l’ambiance dans le public, ou l’état d’esprit des participants.
Le spectacle
Cette zone poussiéreuse, sale, entièrement bétonnée se situe à une trentaine de kilomètres au nord de la capitale. Ici, l’apparition d’un arbre est un luxe. […] Ce que les spectateurs veulent voir, ce sont deux hommes (ou deux femmes) se frapper à coups de parebrise ou de néons, se planter des agrafes dans le front ou se fracasser le visage contre les coffres de vieilles voitures.
La lutte libre extrême consiste à ouvrir un combat en un round sans limite de temps, dans lequel tous les coups sont permis. Dans un pays qui apprécie le catch et ses lutteurs masqués, la lutte libre était déjà une version débridée. La version extrême vise à voir un véritable combat, sans chorégraphie, offrant des émotions fortes plus intenses. Le décor participe de l’ambiance et de l’expérience vécue.
Interview des organisateurs de la Zona 23
Je rassemble ici plusieurs extraits de l’article, des paroles des organisateurs des combats de la Zona 23 qui me paraissent évocatrices.
— Quelle est la limite de la violence dans les combats de la Zona 23 ?
— Il n’y a pas de limite.
— Ils se tailladent la peau, se plantent des bouts de verre, se frappent sur les coffres des voitures…
— Pour ça, nous avons une bonne équipe d’infirmiers.
— Quelqu’un est déjà parti en ambulance ?
— Pas jusqu’à présent. Nous sommes le club de catch le plus violent du Mexique et personne n’a jamais fini à l’hôpital.
— Parfois, il faut leur faire des points de suture, les bander. Mais rien de grave, ce sont tous des professionnels.
Le public
Les spectateurs prêts à payer le double du prix d’entrée bénéficient de chaises au premier rang. Les autres sont debout, ou s’installent dans les habitacles de voiture et de camions. Le public est mixte, et compte quelques étrangers, ainsi que des couples avec enfants. Ci-après les paroles d’un père de famille. L’article mentionne aussi des selfies avec des luttes encore couverts de sang (quand ils sont encore capables de marcher après un combat !).
— Ça ne vous gêne pas que votre fils voie de la violence.
— Mon gamin aime la lucha libre, c’est tout, il n’y a pas de mal à ça… Mon père m’emmenait voir des combats quand j’étais petit, et je fais pareil avec mon fils.
Des raisons de combattre
Les combattants sont formés dans des écoles, pratiquent la musculation, et les physiques évoqués sont plutôt trapus. Les praticiens décrits sont des passionnés qui s’entrainent des décennies durant. Le témoignage de Baby Judas me parait une bonne base pour développer des personnages.
Baby Judas, lutteuse
Dans la lucha libre extrême, on dépasse vraiment certaines limites de douleur qu’on n’imagine pas, et ça provoque un véritable pic d’adrénaline. Et tout le problème est là, parce qu’on peut devenir addict. Il y a pas mal de catcheurs qui ensuite reviennent aux combats traditionnels et qui disent : “Non, là, je ne sens plus rien, ça m’ennuie, je préfère rester dans le catch extrême”, et c’est dur.
J’ai hâte d’y retourner [après avoir récupéré de sa blessure]. […] J’en ai envie, c’est sûr, je suis partagée entre la nervosité et l’enthousiasme. C’est une sensation qu’on ne peut comprendre que quand on est là-haut.

🔷Quelles applications ?
La lutte libre me parait constituer un bon élément de décor, de culture urbaine. Actuellement, elle est rangée au chapitre des « loisirs » en Marborda, à côté de notes sur la musique. Elle peut certainement servir de manière plus large, selon le style sur lequel on travaille.
- La lutte libre extrême peut être un élément de décor, avec des rendez-vous donnés lors de ces rencontres, de la même manière que des trafiquants de drogue se retrouvent pour discuter en regardant des matchs de futsal.
- Les cagoules, les masques et les costumes peuvent aussi évoquer le folklore des « super héros », et s’ils restent minoritaires, on peut imaginer que certains participants gardent leur identité secrète, car le contraste entre leur vie et leur passion est problématique.
- D’une certaine manière, la lutte libre extrême pourrait être rapprochée aussi d’un « Fight Club » avec un public. Le côté populaire (avec présence de familles) tranche cependant assez avec l’imagerie des combats clandestins « dans la fosse ». On pourrait envisager que la lutte libre s’est imposée comme un mode « honorable » pour résoudre ses problèmes, sous forme de duel dans certains milieux. Dès lors, on se rapprocherait du duel judiciaire médiéval, avec une esthétique colorée qui s’en éloigne. Le contraste pourrait présenter un certain intérêt en termes d’ambiance.
J’évoque ici brièvement le futsal, qui étaient dans mes notes sur l’Argentine, avec des matchs joués aux alentours de minuit, avec un public passionné, populaire, dans des villes tentaculaires. Il y a un très beau potentiel de culture nocturne pour des contrées inspirées de l’Amérique latine. Au fil des articles que je lis, j’ai l’impression qu’il y a plusieurs orientations possibles, parmi lesquelles :
- Western (le côté « absence de l’État » est quand même très prégnant)
- Film noir (entre les gangs, la corruption, les inégalités sociales abyssales, la culture de nuit, le taux d’homicide)
- Le réalisme magique (les esprits semblent assez proches, avec beaucoup de croyances traditionnelles et syncrétiques)
- Contemporain fantastique (pour les grandes villes, leurs secrets à tiroir, leurs lieux mystérieux, leurs monstres sanguinaires)
- Film d’action à gros budget (parce que beaucoup de situation ressemblent à de quasi guerres civiles, avec des armes lourdes utilisées régulièrement par l’armée comme les gangs ou les milices)
- Beaucoup de débrouillardise, et de courage, et de lutte au quotidien, pour parvenir à survivre, ou à vivre ses passions malgré tout.
Je n’ai pas encore affiné mes propres axes, je suis sur du travail préparatoire d’accumulation de tout ce qui me frappe, même si je ne sais pas comment l’exploiter.

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