Mes cycles de travail sur le système FIM (Fortuna Imperatrix Mundi) suivent toujours un peu le même parcours. D’abord j’essaie d’aller le plus loin possible dans la précision, la finesse et la granularité d’une idée (par exemple l’apprentissage). Ensuite, je réfléchis à trier (façon sélection darwinienne) ce qui parait le plus efficace. Enfin, je me laisse le temps d’oublier tout, et j’entame un nouveau fichier de résumé, dans lequel je rédige les règles de mémoire, en vérifiant sur mes fichiers antérieurs si je suis d’accord avec moi-même.
Cette approche me permet d’élaguer, et de garder uniquement ce qui me parait cohérent et fluide. Mais comme tout est basé sur des intentions ludiques qui ont été décortiquées à la base, je sais qu’en arrondissant, mes approximations respecteront les ordres de grandeurs et sensations générales que je vise.
Le dernier aspect en date à avoir fait les frais de ce cheminement est l’expérience.
Edit : j’ai ajouté « enfin, presque » au titre de l’article, car l’expérience n’a pas totalement disparu !
Sommaire
📍 Les analyses d’œuvres incluent toujours des éléments de contenus. Les titres vous guident sur le contenu des paragraphes.

🔷 Pourquoi l’expérience ?
■ Un bref aperçu des usages
L’expérience est une vieille compagne en jeu de rôle. Elle a des usages variés, mais passe souvent par une mécanique de petits comptes très métajeu, et qui me chiffonnent sur le plan de la progression de l’histoire :
- Le cumul brut et les niveaux : Donjons & Dragons est un exemple de cette mécanique. En substance, à chaque fois qu’on tue un rat ou un gobelin (ehem), on gagne de l’expérience, et au bout d’un moment, parfois long, on passe un niveau. D’un coup, on a accès à plein de nouvelles aptitudes. Inconvénients à mes yeux :
- (1) c’est du tout ou rien, et à 1 point près, on passe de « pas grand chose » à « beaucoup », ce qui me parait bizarre dans le vécu, l’immersion ;
- (2) l’idée de massacrer à l’infini des bestioles faibles pour devenir un grand maitre guerrier (ou mage, ou voleur) me heurte.
- L’achat d’aptitudes : on trouve cette mécanique dans Warhammer, le Monde des Ténèbres, les Ombres d’Esteren. L’expérience est assimilable à une monnaie métajeu qui permet d’acheter une augmentation de compétence ou de caractéristique, ou un trait, ou… Inconvénients à mes yeux :
- (1) on peut thésauriser longtemps l’expérience, en restant « faible » et d’un coup flamber et devenir « fort », avec assez peu de cohérence dramatique. D’ailleurs, rien n’interdit d’améliorer des compétences (ou autre) qu’on n’a jamais utilisé en jeu, mais dont on estime désormais qu’elles seront utiles, et hop, on passe de « zéro » à « 3 », de novice à amateur confirmé.
- (2) on fait des additions d’expérience, puis on supprime pour l’achat de ci et ça, sachant que le palier suivant est plus coûteux, donc je mets la retenue là, et surtout je n’oublie pas ci et ça…
Du côté de l’Appel de Cthulhu, on s’épargne les mécaniques d’expérience au profit de tests dédiés à l’expérience. Le principe :
- A chaque fois qu’on utilise avec succès une compétence, on coche une case à côté de la compétence.
- En fin de scénario ou de séance, on fait un point pour savoir ce qu’on a retenu. Pour chaque compétence cochée, on fait un jet : il faut obtenir un résultat supérieur au score actuel de la compétence. Par conséquent, plus une compétence avait un score de départ faible, et plus on a de chance d’obtenir une amélioration. Mais en regardant les probabilités, la mécanique ne me satisfait que modérément :
- Une compétence à 10% impose de réussir un test à 10% puis un autre à 90% : la probabilité de réussir ces deux tests (donc de s’améliorer) est au final de 9%.
- Quant à un personnage ayant 50% dans une compétence, il a aussi 50% de chance de s’améliorer, ce qui lui donne 25% au final de progresser.
- En fait, on a une courbe qui démarre à très peu, monte à 25% de chance de progression, et retombe progressivement à très peu.
■ Les choix sur FIM
On discerne sans doute déjà en creux les sensations de système que je cherche.
- L’apprentissage suit une courbe de progression : facile au début, puis ponctuée, avec des déclics.
- Répéter les mêmes actions à l’infini n’apprend rien.
- Le gain en fin de partie est prévisible, et pas aléatoire (= soumis à un moment de poisse frustrante aux dés)
- On s’améliore quand on utilise une compétence.
La solution utilisée pendant quelques années et illustrée par la capture d’écran a rempli l’essentiel des objectifs.
- Seuils : on a des seuils entre 4 et 5, 6 et 7, de 8 et 9… Cela signifie qu’il impossible de passer ces valeurs sans accomplir un « exploit ». Celui-ci est nécessairement lié à la compétence. Il peut avoir lieu en jeu (comme une superbe négociation, ou un sauvetage médical…) ou hors jeu (comme rédiger une thèse). Chaque exploit doit être plus marquant, plus exceptionnel ou remarquable que le précédent. Il peut aussi être très différent, mettant en jeu une spécialité différente : thèse en lettre, puis thèse en droit par exemple.
- Dépense immédiate : on place de suite l’expérience acquise dans le scénario, et uniquement dans des compétences utilisées (avec ou sans succès, c’est indifférent).
- Historique : on peut lire la progression avec des souvenirs, des étapes… La fiche traduit fidèlement le texte descriptif. Il n’est pas possible d’avoir un historique de 15 pages épiques et une fiche toute faiblarde à côté, les deux sont étroitement liés.
Il reste un inconvénient à cette méthode par historique : la fiche de suivi de l’expérience. Il ne faut pas la perdre ! Et si quelqu’un hésite, veut changer sa répartition de fin de séance, gomme… ça redevient un peu pénible.
Plus encore, c’est embêtant pour une création à la volée de prétirés. C’est justement cette situation qui m’a amené à réfléchir à une simplification fondée sur le tableau : les équilibrages restent, mais ils passent en salle des machines, invisibles en jeu.

🔷 Par quoi remplacer l’expérience ?
Fondamentalement, l’expérience sur FIM est située entre l’achat et le gain immédiat. Or, cette immédiatement pourrait suffire à nous épargner la collecte d’archives sur le personnage et le détail des dépenses.
Sans surprise, si on se concentre sur des achats immédiats, et si on ôte le tableau détaillant les fondements des coût, on revient à des tables d’achat ! Elles contiennent les conditions dramatiques (avoir utilisé la compétence par exemple). Il y a des avantages et des limites :
- Limite : on a perdu en granularité, avec un apprentissage progressif durant lequel 4 ou 5 compétences pouvaient être dans des zones intermédiaires, avant de passer un seuil ensemble
- Avantage : chaque achat a un effet immédiat, on ne sort pas d’une partie sans avoir « gagné » quelque chose
- Inconvénient : sur un scénario où l’on ne gagnerait que +2, et avec un personnage déjà un peu avancé, qui aurait « 4 » partout, il ne reste plus qu’à acheter des traits… mais un gain final à +2, ça signale aussi une histoire plutôt anecdotique
- Avantage : la mécanique précédente était centrée sur les compétence et ne prenait ni en compte les éléments, ni les traits, alors qu’ils sont importants dès qu’on joue sur la durée ; c’était un vrai manque. Je suis plutôt contente d’avoir un début de solution pour eux.
Remarque : toutes les valeurs sont paires, donc on pourrait diviser tout par 2. Cependant, l’échelle en jeu étant sur 12, et utilisée intensivement, il est dans la pratique plus facile de se représenter l’intensité et l’importance d’un achat ou d’une récompense de scénario.


En substance, contrairement à l’indication du titre (publicité mensongère !), je n’ai pas mis totalement l’expérience à la poubelle, mais j’ai travaillé à réduire le volet qui m’embêtait, à savoir l’archivage nécessaire à savoir où l’on en était dans les achats et évolutions.
La réforme me parait également résoudre deux problèmes : la gestion des traits (avantages et désavantages individuels) sur la durée + le fait de sortir d’une partie sans « gain » concret, à juste 1 PX du seuil.
Je conserve les conditions dramatiques qui, dans mon expérience, fonctionnaient bien. Les arrondis et simplifications aboutissent à réduire un peu le coût ici, et augmenter un peu là, mais j’ai l’impression que le bilan est équilibré, et plus léger.
En conclusion ?
Le choix des mécaniques autour de l’expérience traduisent une intention autour de la capacité à progresser, et l’échelle de ce progrès. Plus le système implique d’archivage et de calcul subtils, et plus on tend à s’adresser à des joueurs très investis, en leur demandant de passer du temps à lire les règles et optimiser.
Vous noterez qu’il n’y a pas de caractéristiques sur FIM, un sujet déjà abordé dans de précédents articles. Les traits remplissent cet office si vraiment il était nécessaire de préciser un profil !
A suivre ! ✨

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